Cueillette

Dons et offrandes à la Nature

Janvier marque le temps de la gratitude.

Depuis que l’entreprise a été créée en 2018, nous procédons chaque année au même rituel : les offrandes à la Nature. Véritable chaînon de notre travail de cueillette, il s’inscrit dans le cycle du vivant, et nous permet de mettre en action le principe du retour à la Terre. 

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Les rituels d’offrande dans le monde

 

J’ai eu l’occasion de rencontrer, d’écouter et de lire de nombreuses traditions de par le monde, et celles-ci marquent toujours un point d’importance aux offrandes. Qu’elles soient pratiquées de manière rituéliques, ou très simplistes ; qu’elles soient religieuses, spirituelles ou profanes, elles sont un moyen de reliance, de liaison au vivant, de se reconnecter à l’environnement.

Dans nos coutumes locales, il était d’usage par exemple de faire une cérémonie avant d’abattre un arbre, afin de le prévenir de l’acte envisagé, de sa raison et de lui en demander de fait l’autorisation. Il en va de même pour certaines plantes récoltées à une heure précise, un jour particulier de l’année, avec un outil fait d’un métal adapté. Aujourd’hui, difficile d’appliquer cela et d’en prendre le temps, car tout doit aller vite.

Difficile donc d’imaginer des chantiers de déboisements avec une pause entre chaque arbre pour lui demander son avis et son autorisation. Difficile de préparer des récoltes toujours plus grandissantes en prenant soin de chaque graine, et en traitant chaque acte de sa croissance avec amour.

Et pourtant…

 

La relation au vivant

 

Et pourtant nous y revenons. Nous y revenons par abandon, par dégoût d’un monde qui nous oppresse et nous prive de ce lien sacré qui nous unissait avec le vivant. Nous n’agissons plus avec l’instinct, mais avec la logique d’une production. Mais pour quoi ? Pour qui ? Pour notre bien-être ? Je ne pense pas, et encore moins pour celui d’autrui.

Lorsqu’un ami ou un voisin vous prête main forte, comment vous sentez-vous ? Heureux ? Soulagé ? Peut-être redevable ? Quelqu’un est venu à votre secours, parfois sans que vous ne le demandiez, et vous a apporté son aide, sans contrepartie. Sans argent. Alors vous vous rendez-vous compte qu’il est possible d’aider, d’aimer par pure bonté, sans intention autre que vous mettre au service de. Vous avez eu la démonstration du possible. Et si votre ami ou votre voisin était plus proche que vous ne le pensiez ?

Nous partageons avec nos semblables humains bon nombre de caractéristiques qui nous font nous rapprocher les uns des autres (ou parfois nous éloigner !), mais d’où venons-nous ? Si par la forme, nous pouvons être différents de la fourmi ou de la fougère, qu’est-ce qui au final nous différencie vraiment d’elle ? Elles font toutes deux partie de l’environnement, respirent, se meuvent, échangent avec leurs congénères. Elles se nourrissent, se reproduisent, vivent et meurent. Bien sûr, des différences existent, mais fondamentalement, ce sont nos voisines, et pourquoi pas, nos amis.

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Des amis, nous en avons donc plein autour de nous, à condition de les considérer comme tel, et de sortir du cadre qu’on nous propose : celui de l’utilisation et de la consommation. 

Une plante que nous prenons en tisane a été prélevée de l’environnement où elle a grandi pour nous rendre un service. Ce peut être un plaisir gustatif, une découverte sensorielle, un remède à un mal quelconque, la finalité reste la même : elle nous rend service. Et nous ? Comment rendons-nous service à ces autres amis ? Je ne parle pas ici d’obligation, de se sentir redevable, mais je pose simplement une question : qu’apportons-nous à celles et ceux qui nous aident au quotidien ?

Nous avons tous des talents que nous aimons mettre au service du don. Certains vont calligraphier des cartes, d’autres confectionner des tableaux, des objets en bois, d’autres vont simplement aider à faire des travaux dans la demeure. Tous ces actes d’entraide peuvent être mis au service de la nature et de ses habitants. Et ce faisant, vous retrouverez peu à peu ces racines que vous pensez avoir perdues.

 

 

Car au final, ce que nous croyons avoir perdu, c’est simplement la simplicité des actes du quotidien. Comme le disait un vieux monsieur, “ce sont les petites choses, les gestes quotidiens des gens ordinaires qui nous préservent du mal. De simples actes de bonté et d’amour”. Et je crois fortement que c’est là tout ce dont nous avons besoin.

Nul besoin donc de complexité, seule compte à mes yeux l’attention et l’intention, le simple élan du cœur, la volonté de faire plaisir, dans le respect d’autrui. Alors, petit à petit, vous remarquerez que l’environnement vous est plus familier. Vous vous y sentirez plus à l’aise et serez plus sensibles à ses changements. Il vous sera alors possible de mieux le comprendre et lui venir en aide si le besoin s’en fait sentir. Peu à peu, vous retisserez des liens avec la nature et vos sens, devenant partie du tout, et travaillant avec ce formidable outil qu’est l’instinct.

“Oui, mais comment faire pour rendre service à tous ceux qui m’ont aidé ? Je n’aurais jamais assez de temps !” Pas de panique, ici, il n’est pas question de temps, mais d’attention et d’intention. Je ne vous demande pas (et qui serais-je pour le faire ?) de réaliser une œuvre picturale à chaque plante que vous allez récolter. Non, simplement prendre le temps de demander, comme à un ami, de vous prêter main forte. Et une fois le service rendu, remercier. Ensuite, une fois la saison de récolte passée, vous pouvez vous rendre sur vos terrains de cueillette pour apporter ces fameux dons ou présents. Selon les traditions, ils peuvent être multiples. L’idée principale est qu’il nous coûte. Pas pécuniairement parlant j’entends, mais que nous nous soyons engagés dans sa réalisation.

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En pratique :

 

Voici quelques exemples de présents que nous réalisons au fil des ans :

  • Fabriquer des animaux ou petits personnages en jonc tressé, et les déposer sur une souche ;
  • Créer des petits présents en saule et ficelle tressée, à suspendre à un arbre sur le lieu de récolte ;
  • Réaliser de petits biscuits et les offrir aux animaux ou aux esprits du lieu ;
  • Préparer une boisson et la verser sur un espace choisi dans le lieu ;
  • Confectionner de petites réserves de nourriture pour les oiseaux ;
  • Faire une oeuvre de landart…

Il existe plein de façons de rendre grâce et d’exprimer sa gratitude, l’essentiel est de le faire par envie et en conscience. Cela implique de se renseigner sur celui ou celle à qui nous allons faire le présent (pas question d’offrir un album de country à une plante qui n’aime pas ça), et d’utiliser des éléments qui ne seraient pas néfastes. Vos présents doivent pouvoir se dégrader dans la nature sans présenter de risque pour qui que ce soit. 

Et pour le déposer, c’est simple, rendez-vous sur le lieu de cueillette, et cherchez un espace où déposer vos dons. Vous pouvez le formuler à voix haute ou intérieurement, et vous laisser vagabonder dans le lieu. Vous aurez peut-être une image qui vous viendra, vos pas qui vous conduiront à un lieu, un son, une voix, laissez-vous guider, et déposez cela où il sera juste de le faire. Prenez un temps pour vous souvenir de ce que ce lieu et ces habitants vous ont offert, avant d’offrir à votre tour votre création. Ce n’est pas une course, laissez-vous l’espace nécessaire à cela. Et une fois le présent offert, partez simplement vers vos occupations habituelles. Car ce sont réellement ces gestes simples du quotidien qui participent à la beauté du monde. Beauté dont vous et moi faisons entièrement partie.

Cyril

Je suis un autre lui, il est un autre moi.

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